Depuis un certain temps les chroniqueurs ont pris d’assaut la sphère médiatique. Ils sont présents sur tous les plateaux de télévision ou des sites internet pour décrypter l’actualité. Politique, sport, société, géopolitique, rien ne les échappe. Ils abordent tous les sujets comme de vrais experts. Malheureusement le constat est que la plupart de ces chroniqueurs se sont retrouvés du jour au lendemain sur le petit écran sans les compétences requises.
Un chroniqueur peut ne pas être un journaliste mais un expert dans un domaine précis. Les médias peuvent faire appel à lui selon l’actualité. Au Sénégal, ils parlent de tous les sujets même ceux pour lesquels ils sont profanes. Cette situation a éloigné les vrais savants de l’espace public. D’aucuns ne trouvent plus l’intérêt d’intervenir sur les affaires de la cité d’autant plus que ce rôle est déjà occupé. La conséquence ? Nous assistons à une promotion de la médiocrité. On ne sait plus qui est journaliste, animateur et chroniqueur. Tout le monde fait la même chose.
Cette situation désacralise le métier de journaliste qui jadis était très respecté au Sénégal. L’avènement des chroniqueurs experts en tout a favorisé la prolifération des fake news et des diffamations. D’honnêtes citoyens sont quotidiennement accusés à tort de commettre des crimes. Ce qui explique les nombreuses plaintes contre des journalistes et chroniqueurs.
Alors que le président de la république a annoncé une proposition d’un projet loi visant à protéger les lanceurs d’alertes, son effectivité pourrait créer plus de problèmes qu’il n’en résoudrait. Tout le monde voudra se proclamer lanceur d’alertes si bien évidemment la loi ne précise pas les personnes concernées. Si les autorités ne prennent pas les dispositions nécessaires, d’aucuns se serviront de cette loi pour se considérer comme des intouchables et continuer à salir la vie de leurs prochains.
Certains de ses chroniqueurs finissent par être le bras armé des politiciens et des hommes d’affaires. Ils sont parfois chargés de défendre leurs mentors ou de charger ceux qui ne partagent pas leurs points de vue. Dès lors, l’objectivité n’est plus au rendez-vous. Les organes de régulation semblent être impuissants face à ces dérives qui constituent une menace pour la cohésion sociale. Par exemple, un journaliste chroniqueur a eu l’audace de traiter de bétail électoral toute une communauté. Cette déclaration qui a soulevé l’ire populaire aurait pu aboutir à de malheureux événements.
Pour reprendre le contrôle et assainir le métier, les professionnels de l’information et de la communication ont l’obligation de revoir le fonctionnement de leur métier ne serait-ce que pour préserver le peu d’estime que le peuple a pour eux. L’Etat doit également prendre ses responsabilités en apportant les réformes adéquates. Le silence des acteurs concernés anticipera la disparition du métier de journaliste qui est indispensable pour une démocratie comme la nôtre.
Pour le bien du public les méthodes de fonctionnement sont aussi à revoir pour que les vrais savants reviennent devant le petit écran pour parler des sujets sérieux qui peuvent contribuer à relever le niveau du débat public et discuter de choses intéressantes. En attendant, les experts en tout (les chroniqueurs) continuent de manipuler, de diffamer, de calomnier et de parler de ce qu’ils ne maîtrisent pas. On peut même se demander s’ils sont tous libres ? Pour qui parlent certains ? Sont-ils payés pour nous tympaniser à longueur de journée ?