En cette période de fraîcheur, les rues de Dakar deviennent un véritable calvaire pour les jeunes “talibés”. Contraints à mendier à longueur de journée pour rapporter de l’argent à leur maîtres coraniques, ils affrontent le froid pieds nus et vêtements adaptés pour se protéger des rigueurs climatiques.
Dès les premières heures du matin, certains quittent leurs “daaras” vêtus de tenues légères souvent en lambeaux. Le vent frais pénètre facilement à travers leurs vêtements usés, leur peau exposée portant les stigmates de cette vie difficile. Le froid assèche leur peau déjà malmenée par la poussière des rues, leur donnant un aspect gras rugueux. Leurs lèvres, gercées par le vent sec, sont souvent enflammées, les obligeant à les humidifier constamment pour tenter d’apaiser la douleur. “Il fait trop froid et nous sentons profondément la fraîcheur. Chaque jour, nous sommes dans la rue pour avoir quoi verser à notre maître. C’est dur, parce que je n’ai pas d’habits lourds”, confie l’un d’eux, le regard perdu dans le vide.
Leurs pieds noirs de saleté témoignent des kilomètres parcourus quotidiennement. Gras et fissurés, ils souffrent du froid mordant du bitume frais. A chaque pas, le sol semble aspirer la chaleur de leur corps, rendant la marche encore plus pénible. Malgré cela, ils continuent leur quête, tendant la main avec un sourire timide, espérant une aumône qui leur permettra de remplir leur mission journalière.
Alors qu’ils devaient tous être dans leurs “daaras” à recevoir un enseignement religieux, ces enfants passent la journée dans les rues, exposés à tous les dangers. La fraîcheur devient parfois un prétexte pour échapper à leur maîtres et aux exigences du “daara”. Le soir, on les retrouve blottis devant les restaurants ou dans des coins abrités pour échapper au vent et trouver de quoi apaiser leur faim.
Malgré la dureté des conditions, certains se lèvent à six heures du matin pour mendier. “Depuis que la fraîcheur a commencé, nous souffrons beaucoup. C’est vraiment dur pour nous”, avoue un autre, les bras croisés sous le pont du croisement cambérène pour se réchauffer.
Cette vie de rue expose “les talibés” à une insécurité permanente et à un manque de protection face au froid. Pourtant, des voix continuent de s’élever pour réclamer le retrait des enfants de la rue le respect de leur droit à l’éducation. Mais en attendant un changement concret, ces enfants doivent s’adapter comme ils peuvent.
Cependant, quelques gestes de solidarité viennent parfois soulager leur souffrance. En effet, des personnes bienveillantes collectent des tenues lourdes pour les distribuer à ces enfants dans le besoin.”Des personnes nous ont donné des habits lourds. Grâce à cela, je n’ai plus trop froid le matin” raconte un jeune “talibé”, enveloppé dans une veste trop grande pour lui, mais qui lui offre un peu de chaleur.
Malgré ces efforts des bonnes volontés, ces dons restent insuffisants pour répondre à l’ampleur des besoins. Le froid continue de dicter sa loi et aggrave les conditions de vie déjà précaires des “talibés”. Ce besoin rappelle à cet effet l’urgence de trouver des solutions durables pour protéger ces enfants vulnérables et garantir leur droit à une vie digne et sécurisée.